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Rarement un défi politique aura soulevé autant d’objections, d’interrogations, de réserves, de craintes d’échec. La transition environnementale des copropriétés aboutira-t-elle ? On mesure les embarras qui semblent la vouer à l’échec: les difficultés des copropriétaires à financer leur quote part de travaux, en moyenne comprise entre 15000 et 35000€, mais aussi les doutes sur la fiabilité des diagnostics ou encore le nombre insuffisant d’entreprises compétentes pour mener à bien les chantiers, notamment labellisées RGE (reconnues garantes de l’environnement), c’est-à-dire donnant accès aux aides de l’État. Pourtant il faudra y arriver. Quelles sont les conditions de la réussite et sont-elles vraiment hors de portée ?

Il est d’abord nécessaire que les vraies raisons d’engager la rénovation des immeubles concernés, de l’ordre des deux tiers des quelque 600000 copropriétés, apparaissent aux yeux des copropriétaires. La réduction des factures énergétiques, certes, mais aussi le gain en confort de vie l’hiver et plus qu’avant l’été, pour faire face au réchauffement climatique, voilà des motivations fortes. On sait enfin que la valeur verte a désormais cours au sein du patrimoine résidentiel, comme elle existe dans le domaine tertiaire. Aucun copropriétaire ne peut espérer vendre son bien le même prix s’il est affecté d’une mauvaise étiquette énergétique. En outre, tous les syndics dressent le même constat: sans la contrainte de programmer des travaux de transition énergétique, créée par la loi Climat résilience du 22 août 2021, des interventions techniques pourtant nécessaires à la bonne conservation du bâti n’auraient pas été votés et auraient été différés sine die. L’amélioration écologique sera l’occasion d’embarquer la maintenance générale de l’immeuble. À cet égard, les copropriétés vont devoir être attentives à la qualité de travaux à forts enjeux: les assurances dommage-ouvrage devront être souscrites avec rigueur, et il sera également essentiel que les performances énergétiques promises soient atteintes, sauf à ce que la responsabilité civile professionnelle des entreprises en bâtiment soit engagée.  

Important aussi que la phase diagnostique soit menée à bien, condition pour apprécier quels travaux sont nécessaires. On rappellera que les actes des diagnostiqueurs sont depuis 2021 opposables. En clair, ils ont une valeur juridique telle que leurs auteurs peuvent être mis en cause s’ils se révèlent erronés à la faveur d’un autre diagnostic. Il est indispensable dans ce contexte de vérifier que les experts qui sont choisis sont dûment couverts en cas d’erreur professionnelle.

La question du financement est évidemment cruciale. Elle renvoie bien sûr aux aides nationales voire locales auxquelles les copropriétés peuvent prétendre. Elle est également liée au concours que les banques peuvent apporter aux copropriétés. D’évidence la communauté des prêteurs n’est pas encore en ordre de marche: seules deux enseignes proposent des prêts collectifs. Il reste que la question de la solvabilité renvoie à la capacité à rembourser les crédits souscrits pour payer les travaux. S’agissant des copropriétaires bailleurs, majoritaires dans les copropriétés des grandes villes -ce que beaucoup ignorent-, la difficulté est majorée par l’aléa de l’impayé de loyer par le locataire.

Se préserver des impayés par une garantie spécifique, qui indemnise aussi le propriétaire en cas de dégradation et finance les éventuels frais de contentieux, est crucial. Un copropriétaire bailleur qui pâtirait de revenus fonciers irréguliers ne pourrait pas faire face aux dépenses importantes liées à la rénovation environnementale, s’ajoutant aux charges courantes. Avec le même souci d’anticipation, il importe que les copropriétés souscrivent une protection juridique étendue au recouvrement des charges collectives: des impayés anormalement élevés auront pour effet de compromettre les projets de transition écologique. Les banques elles-mêmes ne consentiront pas de prêt à une copropriété dont l’équilibre financier ne sera pas établi.

Conduire les copropriétés vers la vertu énergétique est une ambition élevée, mais elle n’est pas hors de portée. Loin s’en faut. Elle exige néanmoins que les copropriétaires et les syndics à leur service aient le souci de process sûrs et fassent à la préoccupation assurantielle la place qu’elle mérite. La mutation environnementale met en exergue l’utilité d’une exigence sans concession dans la maitrise des divers risques, pour faire de ce tournant un moment heureux de la vie des copropriétés, sans mauvaises surprises.

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